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Artist presentation

Karine Le Ouay

Karine Le Ouay, auteure-photographe, est basée à Paris.

De son enfance en Amérique du Sud, elle a gardé une sensibilité aux couleurs, aux odeurs et

à la lumière. Diplômée du Celsa-Paris IV Sorbonne, elle commence sa carrière dans la

communication. Dès 2017, sa rencontre avec les filles de Robert Doisneau l’incite à se lancer

comme photographe professionnelle. Elle débute alors dans la photographie de presse puis

obtient le diplôme de l’École des métiers de l’Information en photographie documentaire en

2021 avant de rejoindre le collectif Divergence Images en 2023.

En parallèle à son travail de commande et de portrait, Karine Le Ouay développe des séries

personnelles centrées sur une écriture sensible du quotidien, à la frontière du documentaire

et du poétique. Elle explore son environnement de manière à créer des atmosphères

cinématographiques empreintes de douce nostalgie, d’élégance, de sensualité et de

mystère.

Son travail est notamment exposé par la galerie Leica, Photodoc-Paris et l’Union des

Photographes Professionnels. Elle a été exposée au Festival Confrontations Photo de Gex en

2024, à la galerie Taylor et a obtenu la Mention Prix du public aux Nuits photographiques de

Pierrevert en 2023. Ses photographies ont été publiées dans les ouvrages collectifs Etre vingt

ans du collectif Divergence Images (2025) et Ce monde-là, voyage aux frontières du

photojournalisme (Loco, 2022).

Elle travaille régulièrement en commande pour la presse française et pour des clients

institutionnels.

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Artist statement

Série Variations autour d’un rayon de soleil – Karine Le Ouay

Dans cinquante ans, les historiens se pencheront sur la période du confinement.

Nul doute qu’ils n’examinent avec attention les productions d’une société ainsi mise à l’arrêt.

Combien de journaux intimes, de comptes Instagram, confidents de l’humeur de la foule ! Mais aussi

combien d’artistes, de peintres, d’écrivains, de photographes se seront-ils emparés de ce temps de «

vacance », pour en faire la matière d’une œuvre ! L’interdiction de sortie, l’injonction à rentrer chez

soi se sont mués, pour certains, en une invitation à “entrer en soi”.

Dans ce moment général d’introspection, loin de se déshabiller, Karine Le Ouay a choisi au contraire

de s’en tenir apparemment aux seules apparences. Pas de visage nu, qu’un corps vêtu. Assignée à

résidence, elle a retourné cette réclusion obligatoire en un dispositif d’évasion imaginaire. Chaque

jour, à la même heure, au même endroit dans l’appartement, sous une même lumière, elle s’est ainsi

glissée, comme une échappatoire au grand enfermement, dans une tenue à chaque fois différente.

Au fil de cette suite très “pop” de femmes assises sous la lumière, elle s’est mise en scène dans un

boudoir secret et sacré, à travers une succession d’autoportraits habillés, alternant différentes

figures, saisissant « la femme au maillot de bain”, « la femme au bouquet de muguet”, « la femme

champêtre au panier de fruits”, « la joueuse de cartes”, « la femme à l’accordéon”, « la femme au

gâteau d’anniversaire”, « la femme qui se fait les ongles”…et bien d’autres encore.

Des personnages, des images, des moments de la vie, cette femme qui se démultiplie dans le feuilleté

de l’existence, témoigne de ce que, comme l’écrivait Proust, nous sommes composés d’une multitude

de “moi” qui apparaissent ou disparaissent au gré des circonstances. Comme dans un rituel réglé au

millimètre, la femme photographe (qui apparaît d’ailleurs dans la série) s’est retrouvée

quotidiennement face à elle-même pour cet exercice de transformisme singulier où Karine le Ouay a

fait tourner au ralenti le carrousel de son vestiaire, épousant le rythme de la vie lente sous

confinement. Ainsi est-ce le film de son existence que nous voyons défiler, non à vingt-quatre images

par seconde mais à une image toutes les vingt-quatre heures ! Et quel rendez vous - érotique aussi

bien que métaphysique -, pour quelqu’un qui fait profession d’écrire avec la lumière, que celui que

l’on donne, comme elle le dit, « à un rayon de soleil », qui dessine tous les jours ce même parfait cône

de lumière, découvrant un surprenant corps de femme sans tête. Comme les héroïnes des toiles de

Hopper qui se tiennent à la fenêtre en attente du soleil, cette femme assise accueille le rayon comme

la lumière d’une Annonciation qui la révèle à elle-même. L’image, construite aussi rigoureusement

que les vierges gothiques du moyen âge, inscrite dans un triangle de lumière, buste droit et bras

occupés, relevé le plus souvent d’un décor floral, offre un curieux autoportrait : le visage est laissé

dans l’ombre tandis que le corps, découvert par la lumière, oppose à cette révélation les sortilèges du

travestissement. Le moi s’y offre et s’y cache selon la dialectique clignotante du paraître. Les

différents états du textile, qui caresse, qui enveloppe, qui enserre, qui frotte la chair (du maillot de

bain à la robe de soirée) saturent ces images d’une forte sensualité. Voire d’un autoérotisme féminin

propre à l’étoffe qu’un psychiatre du XIX e siècle, Gaëtan Gatian de Clerambault, avait déjà mis en

évidence à travers une série de photographies de femmes maghrébines. Qui suis-je ? Qu’en sais-je ?

Quand suis-je véritablement celle que je suis ? Dans ce tourniquet sans fin de l’identité, Karine le

Ouay a choisi de s’étourdir en pariant que le travestissement pouvait être le meilleur révélateur du

moi - un peu comme le suggère, sous une forme plus radicale, l’œuvre d’une Cindy Sherman.

Rien de plus profond que la surface de la peau, écrivait Cocteau. Rien de plus vrai que le

travestissement, semble répondre en écho la photographe.

Thierry Grillet, écrivain et essayiste.

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